Le Cimetière de Bayeux Est

Cela fait deux ans aujourd’hui que notre papa André Cauderlier repose au Cimetière Saint-Exupère de Bayeux dit Cimetière de l’Est.

Bayeux Cimetière de l’Est
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C’est un cimetière qu’il connaissait bien et où il n’est pas seul.

Les familles Cauderlier, De La Haye, Le Barbey et Boucher y comptent au total au moins 9 tombes dont certaines font l’objet depuis qu’elles existent de l’attention de toute la famille, tandis que nous en découvrons d’autres aujourd’hui dans les registres.

La compétence et la gentillesse des gardiens des cimetières de Bayeux ainsi que la disponibilité en ligne des registres de ces cimetières nous donnent la possibilité de tenter d’identifier et de documenter ces tombes.

1- La tombe “Famille Cauderlier De La Haye”

Bayeux Cimetière de l’Est
Coin Sud – Implantation

Léopold et Emélie Cauderlier sont les premiers de la famille à s’installer à Bayeux.

Léopold y décèdera chez lui le 26 mai 1909 et sa tombe est la plus ancienne que nous connaissions de la famille dans ce cimetière de Bayeux Est.

Il n’est cependant pas tout à fait sûr que ce soit la plus ancienne de toutes car Léopold n’est pas le premier à être mort à Bayeux, son jeune frère Arthur Edmond Cauderlier ( ou Cordelier) est décédé chez Léopold à l’âge de 17 ans et 8 mois le dimanche 25 novembre 1877 à 6h du matin dans des conditions qui nous restent mystérieuses.

Bayeux Cimetière de l’Est
Coin Sud – Détail – Concession S03-N199

Cependant il me semble probable – mais ce n’est pas sûr – que Arthur Edmond ait été inhumé avec ses parents à Carentan.

S’il a été enterré à Bayeux, le souvenir en a été perdu tant au niveau familial que des registres numériques.

Léopold est donc inhumé à Bayeux le samedi 29 mai 1909 au matin dans la tombe 199 de la section 3.

C’est une tombe qui n’a cessé d’être fleurie depuis. Elle est située dans le coin Sud du cimetière.

Bayeux Cimetière de l’Est
Coin Sud – Concession S03-N199

Le vendredi 23 décembre 1927, sa femme Emélie Adélaïde née Halley, décédée le 20 décembre à l’âge de 83 ans, le rejoint.

A en croire le registre numérisé, la concession est attribuée à la famille Cauderlier et Léopold et Emélie en seraient les deux seuls locataires.

Seulement voilà, la pierre tombale mentionne aussi la famille De La Haye, et justement nous avons des représentants de cette famille qui ne sont pas mentionnés dans le registre numérique.

Il s’agit de François Antoine De La Haye dit Francis, décédé à Bayeux le 24 juillet 1923 et de son fils Raymond De La Haye, décédé à Bayeux le 24 janvier 1929.

On peut légitimement penser qu’ils sont également enterrés dans cette tombe et ce pour une simple raison de place disponible car, comme nous le verrons ci-dessous, en juillet 1923 la concession familiale De La Haye est complète.

Les données officielles sont minimales et incomplètes

Comme Francis est décédé avant Emélie, cela signifie qu’Emélie a donné son accord pour que l’on inhume Francis, le frère de sa bru aux côtés de son époux.

On mesure ici combien les liens entre les deux familles étaient forts.

2. La tombe “Famille De La Haye – Mlle Hopquin”

Bayeux Cimetière de l’Est
Mur Sud-Est – Implantation

La seconde tombe la plus ancienne est celle de la famille De La Haye.

Cette fois les grands-parents Joseph De La Haye et sa femme Marie née Tranchant sont précédés dans la tombe par leur jeune bru Maria née Raux, la première femme de leur fils ainé François Antoine dit Francis qui décède à Bayeux le 9 août 1916.

Bayeux Cimetière de l’Est
Mur Sud-Est – Détail – Concession S03-N199

Nous sommes alors en pleine guerre mondiale où Francis a été mobilisé ; mais il est possible qu’il soit de retour à Bayeux à ce moment du fait qu’il a été gazé et est rentré chez lui avant la fin de la guerre. Pour en avoir la certitude il faudrait retrouver son dossier matricule militaire.

Maria est donc inhumée à Bayeux dans la tombe 21 de la section 10.

Cette tombe elle aussi n’a cessé d’être fleurie depuis.

Bayeux Cimetière de l’Est
Mur Sud-Est – Concession S10-N021

Elle est située le long du mur Sud-Est du cimetière.

Moins d’un an plus tard, le 4 mai 1917, Maria est rejointe par sa belle mère Marie De La Haye née Tranchant.

Puis son beau-père Joseph De La Haye, décédé le 16 janvier 1923, y est également inhumé.

On comprend qu’au décès de Francis le 24 juillet 1923, il y ait un problème de place, une sépulture en pleine terre ne pouvant accueillir que trois cercueils.

C’est seulement 40 ans plus tard, dans les années 1960, que cette concession est de nouveau utilisée pour accueillir les cendres de deux dames qui n’ont d’autre lieu où aller.

On note une interversion des dates de décès des 2 grands-parents De La Haye, une faute de frappe dans le nom Hopquin et une confusion entre 1925 et 1923.

Il s’agit de Cécile De La Haye tout d’abord, décédée à Bayeux le 25 mai 1964, la benjamine de la fratrie, qui rejoint ses parents et la première femme de son frère ainé.

Puis ce sera Berthe Hopquin, décédée le 17 janvier 1966 qui y sera enterrée, marquant ainsi son appartenance de coeur à la famille.

3. La tombe “Famille Cauderlier – De La Haye”

Bayeux Cimetière de l’Est
Coin Sud – Détail – Concession S09-N227

C’est la tombe du couple formé par les enfants des titulaires des deux tombes précédentes, Henri Cauderlier et Marthe De La Haye auquel s’est jointe leur fille célibataire Denise.

Elle est située dans le même secteur du cimetière que les tombes précédentes, de l’autre côté de l’allée, Section 9 numéro 227.

La concession a été initialement attribuée au décès d’Henri survenu le 31 mars 1945.

Bayeux Cimetière de l’Est
Coin Sud – Concession S09-N227

Bien entendu cette tombe n’a cessée d’être entretenue et fleurie depuis lors.

Son épouse Marthe née De La Haye y repose suite à son décès le 14 décembre 1969.

On note cependant qu’une fois de plus le registre est incomplet car il ne mentionne pas Marthe.

Pourtant la concession est bien de type familial avec les deux noms Cauderlier et De La Haye, même si seul le nom Cauderlier est présent sur le monument.

Cela confirme que de la famille De La Haye, seule Marthe est enterrée ici.

Enfin cette tombe est aussi celle de leur fille Tante Denise décédée à Bayeux le 6 février 1998.

Tante Denise connaissait bien toutes les tombes familiales de ce cimetière où elle venait souvent.

On peut l’imaginer petite venant avec ses parents sur les tombes de ses grand-parents (1 et 2 ci-dessus).

Puis s’occupant de celle-ci qui était celle de ses parents et dont elle n’ignorait pas qu’elle serait aussi la sienne.

Et c’est elle qui nous les a fait connaitre.

4. Tombe Famille Le Barbey Cauderlier

Bayeux Cimetière de l’Est
Emplacement de la Concession S02-N761

Le 30 avril 1967 Jules Le Barbey décède brutalement alors qu’il est de passage en famille à Bayeux.

C’est un choc immense pour toute la famille notamment parce qu’il n’est âgé que de 55 ans.

Il est inhumé au cimetière de Bayeux Est dans la concession numérotée 761 dans le secteur numéro 2 alors qu’il n’est ni résident ni natif de Bayeux.

Son épouse Henriette née Cauderlier le rejoindra après trente et une années d’un lourd veuvage car ces deux là formaient un couple remarquable et nous nous devons de l’évoquer en cette Saint Valentin.

Le cimetière de Bayeux Est devient dès lors le cimetière familial où sont inhumés les deux membres suivants de la famille qui ne sont, eux non plus ni résidents de Bayeux ni décédés à Bayeux.

5. Tombe de Catherine Cauderlier née Parmentier

Bayeux Cimetière de l’Est
Emplacement de la Concession S04-N080

La tombe Secteur numéro 4 Numéro 80 est celle de Catherine Cauderlier née Parmentier, première épouse de Philippe Cauderlier décédée le 9 juillet 1999 à l’âge de 44 ans.

6. Tombe d’André Cauderlier

Bayeux Cimetière de l’Est
Emplacement de la Concession S04-N179

La tombe Numéro 179 de la section 4 est depuis deux ans aujourd’hui même la dernière demeure de notre père André Cauderlier, décédé à Paris le 2 février 2020 et inhumé à Bayeux le 14 février.

7. Tombe de Léon Boucher et de Marguerite née Boudard

Bayeux Cimetière de l’Est
Emplacement de la Concession
S04-N558

En nous promenant dans les allées du cimetière nous avions trouvé par hasard l’année dernière la tombe de Léon Boucher et de sa femme Marguerite née Boudard.

Il s’agir de la concession numéro 558 de la section 4.

Léon Boucher est décédé en 1967, Marguerite 10 ans plus tard en 1977.

C’est un joli monument contemporain avec une stèle.

On notera à cet égard que des 6 monuments ci-dessus aucun n’a de stèle quoique depuis longtemps la mode des monuments avec stèle s’était imposée.

8. Tombe de Georges Boucher et de Jeanne née Cauderlier

Bayeux Cimetière de l’Est
Emplacement de la Concession S09-N292

En consultant les registres on trouve 2 autres tombes de la famille Boucher que nous ne connaissions pas.

La première est la tombe des parents Boucher, Georges Boucher et sa femme Jeanne née Cauderlier.

Il s’agit de la concession numéro 292 de la section 9.

Nous voila repartis dans le coin Sud non loin de la tombe des parents de Jeanne, Léopold et Emélie notre tombe N°1 ci-dessus et de celle de son frère Henri Cauderlier, notre tombe N°3 ci-dessus.

Tombe de Georges Boucher père et de son épouse Jeanne née Cauderlier

Je suis passé devant cette tombe des dizaines de fois sans savoir que c’était une tombe familiale.

Et c’est aussi sans doute sans savoir les traitements inhumains que l’occupant à fait subir à la pauvre Jeanne internée à Caen que ses proches l’ont enterrée ici au milieu des siens.

Ce monument est plutôt bien conservé et dispose d’une stèle surmontée d’une croix en pierre de grande dimension.

9. Tombe de Henri Boucher

Bayeux Cimetière de l’Est
Emplacement de la Concession S09-N062

La seconde est celle de leur second fils Henri Boucher, il s’agit de la concession numéro 62 de la section 09.

Il semble que cette tombe a été déplacée car il existe 2 références pour 2 emplacements différents?

Mais c’est bien dans la section 9 que l’on la trouve aujourd’hui encore.

La tombe de Henri Boucher au cimetière Est de Bayeux

C’est une tombe très simple en ciment dont la pierre tombale a probablement souffert du gel.

Cette concession cinquantenaire est arrivée à échéance probablement en 2017 et fait donc l’objet d’une procédure de reprise par la mairie.

Nous aurons eu tout de même la chance de la voir et de la photographier avant qu’elle ne disparaisse.

Détail de la tombre de Henri Boucher

Rien à déclarer

Le film

Poste de Douane du film Rien à Déclarer

Avez-vous vu ce film de Dany Boon sorti début 2011 ?

L’action se passe en 1993, au moment où, suite au traité de Maastricht, les postes de douanes fixes situés sur les frontières intra-communautaires disparaissent.

Le lieu de tournage choisi est un petit poste de douane, désaffecté mais authentique, situé entre les communes de Hirson en France et de Macquenoise en Belgique.

Pour forcer le trait, les communes ont été rebaptisées dans le film respectivement Courquain et Koorkin, c’est à dire le même nom en français et en flamand ce qui est, bien sûr, un peu exagéré vu que du côté belge nous sommes ici en Wallonie et non en Flandre !

Inscription réelle du nom du village frontière fictif du film Rien à déclarer.

L’endroit conserve la mémoire de ce tournage et, si la plupart des décors on été démontés, le nom fictif de Courquain figure toujours sur les murs de l’ancien poste de douane plus ou moins transformé en musée des lieux de tournage du film.

Ce n’est pas la première fois qu’un nom fictif de village donné dans une oeuvre artistique finit par être accolé au nom du lieu. On pense immédiatement aux villes proustiennes d’Illiers-Combray et de Cabourg-Balbec mais on pourrait citer aussi Ry-Yonville, Le Plessis-Robinson ou Terre-Natale.

Deux situations analogues

Anor, le poste de douane vers 1910

Si je vous raconte tout ça, c’est que le poste frontière immédiatement au Nord de celui d’Hirson est celui d’Anor, où nos ancêtres Henri Joseph Cauderlier (père) et son propre père Albert Cauderlier ont été douaniers.

Et eux aussi ont vécu ici-même, 200 ans avant le traité de Maastricht, la disparition des frontières et donc de leur emploi de douanier suite à l’annexion à l’Empire français de cette partie de l’actuelle Belgique par Napoléon.

En effet Albert Cauderlier , le grand-père de notre héros, (génération -2 donc) est le fils de Jacques Joseph Cauderlier Maître Chirurgien.

Il est possible qu’il ait lui même aidé son père à pratiquer des opérations chirurgicales dans ses jeunes années car une fiche geneanet laisse entendre qu’il y aurait une mention de “garçon chirurgien” comme emploi sur son acte de mariage en 1773 que nous n’avons pas (encore) retrouvé.

Anor, la salle des visites de la douane vers 1910

On peut imaginer qu’Albert n’a pas pris goût aux amputations sans anesthésie car il rejoint les Fermes du Roy, l’ancêtre de nos douanes modernes, peu après son mariage. De toute façon il a son frère ainé Henry Joseph qui a repris le flambeau paternel de la chirurgie.

Et c’est à Anor qu’Albert commence sa carrière de douanier car c’est là que naissent ses trois premiers enfants.

Albert Joseph Cauderlier, employé des Fermes du Roy

  • Albert Joseph Cauderlier et son épouse Marie Thérèse Joseph Berlingin sont à Anor :
    • en 1774, le 27 juillet (soit 9 mois et demi après le mariage) à la naissance de leur première fille Marie Joseph. Albert, le jeune papa est alors simple employé des Fermes du Roy ;
    • en 1775, le 23 décembre à la naissance de leur premier fils Albert-Joseph (junior);
    • en 1777, le 24 juillet à la naissance de Marie-Thérèse-Joseph (junior), Albert a alors pris du galon il est désormais sous-brigadier ou si vous préférez lieutenant dans les Fermes du Roy.
Anor, Halte de la douane vers 1920

Comme de tradition à l’époque, les enfants sont baptisés dans les heures qui suivent leur naissance. On note que leur père est absent des trois baptêmes de ses enfants nés à Anor alors qu’il lui arrive d’en signer plus tard dans d’autres affectations. On peut tenter une explication en constatant que le poste de douane à Anor est distant du centre du village où se trouvent sans doute leur habitation et à coup sûr l’église.

La petite famille reste donc à Anor au moins trois ans de juillet 1774 à juillet 1777 …

L’uniforme du
Brigadier des Fermes du Roy

… et au plus 8 ans car nous savons que fin 1781, début 1782, ils ont une fille Marie Catherine Joseph qui n’est pas née à Anor et qui est décédée à Taisnières-sur-Hon âgée de 11 ans et demi le 13 février 1793. (de quoi devenir superstitieux !)

Comme elle est bien née quelque part, la petite, on en déduit que papa Albert a été muté sur un autre poste frontière que je n’ai pu identifier jusqu’à présent.

Comme c’est un couple fertile on peut suivre les mutations du père Albert aux actes de naissance de ses enfants car on leur connait 9 enfants.

On trouve donc la petite famille :

  • à Rosult (Nord)
    • en 1784 le 29 mai à la naissance de Marie Joseph (bis)
    • en 1786 le 31 janvier à la naissance de Joseph
  • puis à Lecelles (Nord)
    • en 1788 le 11 juin à la naissance d’Henry Joseph qui deviendra le père de notre héros et un futur douanier lui-même.
      Cette fois notre papa Albert Joseph Cauderlier est Brigadier, il est donc le patron du poste des Douanes.
  • puis à Flines-Lez-Mortagnes
    • en 1791 à la naissance d’Henriette Joseph

Après je crois comprendre que nous rentrons dans des années troubles, les Fermes du Roy disparaissent et le territoire est zone de conflit armé, puis la Douane Nationale est créée et réintègre la plupart des anciens employés des Fermes royales.

A partir de 1801, avec l’Empire c’est la disparition provisoire de la frontière. Elle sera rétablie, presque au même endroit qu’avant, à la Restauration de la monarchie vers 1815. On parlera alors de Douanes Royales, ou Nationales ou Impériales suivant les régimes en place.

Taisnières-sur-Hon, nouveau berceau familial

L’ancien bureau des douanes de Malplaquet, commune de Taisnières-sur-Hon

Ce qui est sûr c’est qu’Albert Joseph Cauderlier et son épouse Marie Thérèse Joseph née Berlingin s’établissent définitivement avec leurs nombreux enfants à Taisnières-sur-Hon, hameau de Malplaquet dès 1793. C’est donc probablement la dernière affectation professionnelle d’Albert.

Ils y sont :

  • en 1793, le 13 février au décès de leur fille Marie-Catherine-Joseph, Albert y signe alors comme “préposé de douane nationale à Malplaquet”
  • et en 1796 le 27 mars à la naissance de leur dernier enfant connu, Marie-Catherine-Joseph (bis), Albert est toujours “préposé de douane nationale”.

Note sur les prénoms identiques

Je note avec un (bis) les deux filles du couple qui portent exactement les même prénoms qu’une de leurs soeurs ainées ! Et cela arrive deux fois :

  • Marie-Joseph (bis) née à Rosult le 29 mai 1784 porte les prénoms de sa marraine et non moins soeur Marie-Joseph, l’ainée de la fratrie née à Anor le 27 juillet 1774 et donc âgée de 9 ans et demi à ce baptême. Là, si l’on ajoute que le père est absent et que le parrain n’est autre que le jeune frère Albert-Joseph âgé de 7ans et demi, on se dit que le baptême a été fait un peu “à l’arrache” et que le choix des prénoms a peut-être été un peu bâclé.
  • Pour Marie-Catherine-Joseph (bis) née à Taisnières le 27 mars 1796, c’est une toute autre histoire : c’est juste que cette enfant venue sur le tard, arrive après le décès de sa soeur ainée Marie-Catherine-Joseph un peu comme pour la remplacer.

Mariages à Taisnières

Toute cette belle jeunesse, dont les ainés ont maintenant la vingtaine, ne tarde pas à faire chavirer les coeurs des jeunes Taisniérois et Taisniéroises ce qui nous donne quelques mariages dans le secteur.

Si on les reprend dans leur ordre de naissance on a :

  • L’ainée Marie-Joseph qui épousera Jean Joseph Huriau qui est natif de Taisnières. Ils s’établieront à Taisnières et aurons 7 enfants mais leur acte de mariage me reste introuvable.
    L’ainé des enfants serait né à Taisnières en 1795. Le mariage a pu avoir lieu en des temps troublés.
  • Albert Joseph junior, a disparu des radars après qu’il a été parrain de sa soeur à 7 ans et demi comme nous l’avons vu.
  • Marie-Thérèse-Joseph Cauderlier a épousé à Taisnières-sur-Hon Jean-Baptiste Auquier, le 13 avril 1812. Papa Albert est alors “Ex Brigadier des Douanes”. C’est chez eux que 20 ans plus tard s’éteindra la Maman Marie-Thérèse-Joseph née Berlingin. La famille Auquier est donc déjà le pilier de la famille à Taisnières et elle le restera (mais c’est une autre histoire).
  • Marie-Joseph (bis) Cauderlier a épousé à Taisnières-sur-Hon Nicolas Joseph Pierquin, le 16 mai 1809. Papa Albert est alors “Ex Brigadier des Douanes du gouvernement français”. C’est malin comme expression quand le régime politique a changé tant de fois en dix ans !
  • Joseph Cauderlier, lui, est cordonnier lorsqu’il épouse le 15 mai 1816 Marie Augustine Joseph Wallerant native de Feignies, un village voisin à l’Est de Taisnières, où tous deux s’installent.
    La date interroge car le 15 mai 1816, c’est aussi la date du décès de leur jeune belle-soeur Justine Sophie Le Maréchal, la mère de notre héros !
    L’histoire ne dit pas si Henry Joseph était au mariage de son frère ou auprès de sa femme.
  • Henry Joseph Cauderlier, justement, a épousé à Taisnières Justine Sophie Le Maréchal le 6 juillet 1814. A cette date, son père Albert est “ex brigadier des douanes françaises” tandis que lui-même en est “ex sous-lieutenant” ! Autant dire que trois mois après la première abdication de Napoléon 1er, la situation des douanes est des plus confuses dans le nord de la France.
    Justine, dans l’acte, est dite “couturière en robe” et domiciliée à Taisnières, mais nous savons qu’ils reviennent du siège de Naarden où ils ont eu un fils le petit Joseph-Marie né là-bas le 31 janvier 1814 et reconnu à Taisnières juste après leur mariage.
  • Henriette-Joseph épousera le 7 novembre 1810 à Taisnières Jean-Joseph Michel qui est manouvrier lui aussi domicilié à Taisnières. ….
  • On ne connait pas la destinée de la petite dernière, Marie-Catherine-Joseph (bis).

Une source geneanet non vérifiée nous dit qu’Albert était “pensionnaire du gouvernement” en 1804, ce qui est conforme au statut de “ex brigadier des douanes” qui est le sien dans les actes où il apparait postérieurement à 1804. Cela nous rappelle que dès l’ancien régime, au temps de la Ferme du Roy, les employés avaient inventé une des premières caisses de retraite avec cotisation pour les actifs et pension pour les anciens !

Albert et Marie Thérèse termineront leur vie tranquillement à Taisnières-sur-Hon entourés de leurs nombreux enfants et petits enfants.

Henry-Joseph Cauderlier Douanier

De toute cette belle fratrie, c’est Henry-Joseph qui a repris le flambeau de son père en s’engageant dans la douane.

A l’époque il semble qu’il était courant que les fils soient employés comme “sur-numéraires” ou mieux pour eux comme “demi-soldiers”. Ce qui veut dire que dans les douanes, outre la retraite à points on avait aussi déjà inventé le stage non rémunéré (ou pas trop) qui débouchait potentiellement sur une embauche.

Les Départements en 1801

Henry-Joseph étant né en 1878, il n’a que 16 ans lorsque son père prend sa retraite en 1804 et on peut l’imaginer d’abord “sur-numéraire” des douanes à Taisnières puis engagé dans la douane impériale qui l’envoie aux frontières nord de l’empire, c’est à dire en Hollande.

Car il n’y a plus de frontière dans le nord de la France, ni à Taisnières, ni à Anor, ni à Rosult, ni à Lecelles, ni à Flines.

Pour Henri, monter en Hollande a dû être une obligation professionnelle.

Henri Joseph Cauderlier et Justine Sophie Lemaréchal

Et c’est en Hollande que l’on trouve la première trace du couple que forment Henri Joseph junior douanier et de sa future femme Justine Sophie Lemaréchal, couturière en robes. Cette trace c’est la naissance, le 1er février 1814 de leur fils aîné Joseph Marie. Ils sont alors assiégés à Naarden.

L’uniforme de lieutenant
des douanes sous le 1er empire

Henry-Joseph et Justine-Sophie se sont-ils connus à Taisnières ? Sont-ils partis ensemble en Hollande ? Ou bien se sont-ils connus là-bas sur place ?

C’est difficile à dire tant nous manquons d’information sur leurs vies au cours de la vingtaine d’années précédente entre 1792 et 1814 mais l’hypothèse qu’ils se soient connus en Hollande est plausible.

La raison de la venue de Justine dans le Nord reste totalement mystérieuse. On sait que son père Thomas Lemaréchal est mort aux armées, peut-être disparu au combat probablement dans les premières années des guerres révolutionnaires entre 1793 et 1796. On sait aussi que le jeune frère de Justine, Henri Narcisse Julien est devenu douanier en Normandie. Alors sont-ils venus pour rechercher une trace de leur père par une sorte de réseau de jeunes douaniers qui les auraient conduits à connaitre Henry Joseph Cauderlier ?
Ou est-elle venue seule ? On sait par l’état-civil que Justine se trouvera ensuite de passage à Maubeuge notamment lorsqu’elle y met au monde notre héros. Or à Maubeuge se trouve le plus grand hôpital militaire de l’Armée du Nord. Que fait-elle là ? Cherche-t-elle une trace de son père dans cet hôpital ou est-elle juste venu vendre des robes de sa confection au plus grand marché de la région ? A moins qu’elle soit simplement venu voir son fils ainé Joseph Marie qui pourrait s’y trouver en nourrice car c’est à Maubeuge qu’il décèdera le 19 août 1815. Ce qui est sûr concernant Henri et Justine c’est qu’ils étaient prêts à se marier dès juillet 1813, date où ils ont commencé à obtenir les autorisations notariées demandée à leurs parents.

Comment ont-ils vécu les premiers revers militaires de Napoléon ?

Moi çà ne m’étonnerait pas qu’ils s’en soit, sinon réjouis, du moins accommodé : rentrer à la maison avec bébé, se marier en famille à Taisnières c’est pas plus mal que d’être assiégé en terre étrangère.

Anor l’ancien poste de la douane en 2011 devenu le café-restaurant
“Au Franco Belge”

A leur retour il se marient donc à Taisnières, le 6 juillet 1814 et reconnaissent dans la foulée leur bébé Joseph Marie.

Leur second fils est notre héros Henri Joseph. Il nait à Maubeuge le 6 juin 1815, et son acte de naissance nous apprend que sa mère Justine était de passage et son père absent.

A Maubeuge ces jours là il se passe des choses historiques. C’est là, en effet, que l’Armée du Nord se rassemble et que les régiments prêtent serment à l’empereur sur les “aigles” (étendards).

L’armée du Nord se mettra en marche quelques jours plus tard, le 14 juin. Justine a-t-elle pu rentrer chez elle à Taisnières avec notre héros nouveau-né ou seront-ils de nouveau assiégés au siège de Maubeuge qui commence peu après la bataille de Waterloo le 20 juin 1815 ?

10 ans plus tard, en 2021,
le café restaurant est fermé

On sait seulement que le premier enfant né à Naarden, le jeune Joseph Marie décède à Maubeuge le 19 août 1815. Il n’a encore que 18 mois et le siège de Maubeuge est levé depuis le 12 juillet. Justine et ses deux fils étaient donc à Maubeuge cet été 1815 à la fois juste avant et juste après le siège de Maubeuge mais on ignore s’ils ont été parmi les assiégés.

A la Restauration, les frontières retrouvent leurs places et les douaniers leur boulot.

Et le poste où Henry Joseph est affecté n’est autre que … Anor où son père Albert avait lui-même débuté sa carrière quelque 40 ans plus tôt vers 1773 !

Le bonheur sera de courte durée car Justine décède à Anor, à l’age de 28 ans le 15 mai 1816. Vu la date il n’est pas impossible qu’elle soit morte en couches. Ce qui est précisé sur l’acte c’est qu’elle est décédée chez elle dans le centre du village et non au poste de douanes.

Que devient, notre héros, le très jeune Henri Joseph junior qui n’a pas un an ? On le retrouvera à son mariage à Taisnières où il a probablement été élevé par ses grand-parents puis embauché dans les fermes de ses oncles et tantes qui sont nombreux là-bas.

Et que devient son père Henri Joseph senior, notre jeune douanier veuf à Anor ?

Il m’a fallu chercher pas mal pour retrouver sa trace car il n’a pas réellement refait sa vie. Il s’est cependant remarié, mais sur le tard, à l’âge de 61 ans.

Saint-Hilaire-sur-Helpe

C’est en effet le 7 février 1839, comme employé des Douanes en retraite, qu’il épouse à Saint-Hilaire-sur-Helpe Marie Barbe Courtin, elle-même âgée de 48 ans et veuve depuis trois ans. Les témoins à ce mariage sont tous amis des époux, l’un est douanier en retraite et un autre est cabaretier, peut-être un futur associé car Henri-Joseph devient lui-même cabaretier à partir de là ( peut-être était-il même bartender en vrai … ).

Et c’est dans ce contexte qu’il a appris qu’en septembre 1851 son fils unique, notre héros, allait déménager en Normandie avec femme, enfants, armes et bagages.

Henri Joseph père et fils se fréquentaient-ils encore en 1851 ? Y a-t-il eu des adieux déchirants entre eux au moment où la diligence qui emmenait Henri fils, sa femme Stéphanie et leurs nombreux enfants a quitté le Nord pour toujours ? Ce n’est pas certain car il n’y a pas trace de la présence ni du père au mariage de son fils ni du fils à celui de son père.

Six ans plus tard, c’est toujours à Saint-Hilaire-sur-Helpe qu’Henri Joseph senior, douanier en retraite et cabaretier décède à 69 ans le 29 décembre 1857.

Coïncidence, c’est également dans les tous derniers jours de l’année, et dans un village pareillement nommé Saint-Hilaire, que son fils, qui porte exactement les même prénoms, décèdera en Normandie 22 années plus tard !

Le poste des douanes à Anor depuis lors

Ne reste que l’enseigne
“Au Franco Belge”

On trouve en ligne de vieilles cartes postales du poste de douane d’Anor, ainsi que des articles sur le passé douanier de la localité, d’autant plus important qu’outre la route c’est aussi à Anor qu’une ligne de train franchissait la frontière.

Après la fermeture du poste frontière en 1993, le local de la douane est devenu un café-restaurant appelé opportunément “Au Franco-Belge”.

Le lieu existe toujours mais il n’y a plus ni barrière, ni poste, et même le café-restaurant a fermé. Il n’en reste qu’un vieux panneau rouillé.

Il est difficile de retrouver l’ambiance qu’ont pu connaitre nos ancêtres, car ils y vivaient au tout début du 19 ème siècle, il y a plus de 200 ans. Le poste que nous voyons est probablement plus récent, et le chemin de fer bien sûr n’existait pas encore.

Débarquement à Saint-Côme-du-Mont

L’histoire orale familiale est composée de bribes d’informations comme un jeu incomplet de pièces de puzzle.

On ne réussit à reconstituer le puzzle que si l’on parvient à y insérer les petites pièces qu’on avait au début. Si l’on reconstitue le puzzle et qu’il reste des pièces sur le côté, c’est qu’il y a quelque chose qui cloche.

Par exemple lorsque mon grand-père André Cauderlier m’a parlé de l’arrivée du sien, Léopold Cauderlier, en Normandie en septembre 1851, il m’a dit que la famille avait tout d’abord posé ses valises à Saint-Côme-du-Mont quelque temps avant de s’installer plus durablement rue de l’Eglise à Carentan.

Bien sûr on peut penser qu’ils ont repéré un petit AirBnB sympa où ils ont choisi de s’acclimater à la fraicheur vivifiante du bon air normand.

C’est possible mais il me semble plus probable qu’ils ont été accueillis par des gens de confiance, de la famille ou des amis.

Sauf que la mémoire familiale n’a pas retenu, à ma connaissance, de cousins à Saint-Côme-du-Mont.

Succession Desmezières Le Maréchal, Septembre 1851
Décès de T. Belin page 1

Reprenons l’arbre généalogique que nous avions établi lors d’un article précédent pour comprendre la succession Desmezières qui provoque le déménagement de nos héros en Normandie. On y trouve un habitant de Saint-Côme-du-Mont, et pas n’importe lequel : c’est Monsieur Thomas Belin, le mari d’Augustine Le Maréchal, qui a été maire de Saint-Côme-du-Mont par deux fois de 1852 à 1878 puis de 1881 à 1884. Semblant de rien ça fait tout de même 29 ans de mandature et de fait, sa profession dans les actes est le plus souvent maire ou ancien maire.

Décès de T. Belin page 2

Sur son acte de décès on précise qu’il a été Président de la Fabrique (qu’est-ce qu’il fabriquait là ? ben il s’occupait des affaires financières de la paroisse et peut-être aussi des sépultures) et aussi président du Syndicat de l’Essiau (Syndicat de quoi ? Ben de l’écoulement des eaux ce qui dans les marais n’était pas une sinécure). Et c’est un homme qui compte à Saint-Côme, c’est même écrit dans wikipédia à la rubrique “Personnalités liées à la commune” de la page sur Saint-Côme-du-Mont sous la forme “Famille Belin (1684 – fin XIXe)” et il a même sa page à lui tout seul dans wikimanche !

Et le pompon c’est qu’à son mariage avec notre cousine Augustine Victoire Henriette Le Maréchal, le 12 juin 1855 à Saint-Côme-du-Mont, l’un des témoins n’est autre que le sous-préfet de Coutances François Plaine, en personne et en toute simplicité.

Tout ça pour dire que Thomas Belin est une personnalité de la vie publique et des activités économiques de droit publique. Par contre on ne trouve pas son nom dans le commerce du sel ou le transport maritime de la famille.

Reste la question : Est-il possible que nos héros aient été hébergés par Thomas Belin à Saint-Côme-du-Mont lors de leur arrivée en Normandie en septembre 1851 ?

P’tet ben qu’oui, …

Le personnage central de cette histoire c’est Augustine Le Maréchal.

Acte de naissance de Augustine Lemaréchal p1

Augustine est la fille ainée de Henry Julien Narcisse Le Maréchal qui est douanier et déjà veuf par deux fois lorsqu’il épouse la maman d’Augustine, Victoire Trésor, qui fait partie d’une famille de marins de Saint-Vaast La Hougue. Des marins qui s’appellent Trésor ça laisse rêveur.

Augustine naît le 17 octobre 1833 chez ses parents à Osmanville, un village tout proche d’Isigny ou son père est douanier, non loin Carentan. On constate que c’est son oncle par alliance Casimir Auguste Desmezières de Carentan, qui déclare la naissance de sa nièce à la mairie.

Acte de naissance de Augustine Lemaréchal p2

Je n’ai pas accès au registre des baptêmes mais je ne serais pas surpris qu’Auguste soit le parrain de la petite Augustine.

Les parents d’Augustine sont assez pauvres, l’oncle Casimir Auguste lui est déjà, ou va bientôt devenir, assez riche. Il est marié à Léonore, la soeur d’Henry depuis 20 ans et ils n’ont pas d’enfant.

Augustine aura trois petits frères Auguste, Louis et Edouard nés respectivement vers 1837, 1839 et 1846. A ce jour je n’ai pas retrouvé les actes de naissance ( ni de décès d’ailleurs ) des trois frères d’Augustine. J’en déduis qu’ils sont nés dans une commune où la famille est passée entre Osmanville (naissance d’Augustine en 1833) et Saint-Vaast La Hougue (recensement de 1846 ci-dessous).

Recensement de la population 1846 Saint-Vaast-La-Hougue, Rue Gautier

En effet en 1846 la petite famille est installée à Saint-Vaast-la-Hougue, le berceau de la famille de la maman (qu’Henry appelait sûrement son petit Trésor).

Les deux plus grands des garçons sont bien là, ils ont 7 et 5 ans alors que le petit Edouard n’est pas encore né. Il naitra en juillet de cette année 1846.

Le père qui est identifié dans ce recensement par son troisième prénom (Narcisse) n’a plus non plus le même métier : il était douanier, il est maintenant épicier. A 56 ans serait-il déjà en retraite de la Douane ?

Ce qui est sûr c’est qu’Augustine qui a 13 ans en 1846, n’habite pas chez ses parents. Alors soit elle est en pension quelque part, soit elle habite déjà chez ses oncle et tante Desmezières à Carentan.

Ce que l’on sait de ses petits frères c’est qu’Auguste et Louis seront marins, et que le jeune Edouard est sans doute handicapé.

Il n’est pas absurde de penser qu’Augustine devenue ado se soit rapprochée de son oncle et de sa tante Desmezières de Carentan qui étaient sans doute en mal d’enfant et qui ont aussi pu avoir besoin d’assistance dans les dernières années de leurs vies.

En 1851, sa tante puis son oncle décèdent alors qu’Augustine n’a pas encore 18 ans, et il semble qu’ils la couchent sur leurs testaments car on retrouve une Augustine Le Maréchal comme héritière et nous ne connaissons pas d’autre Augustine. Pourtant son père est aussi héritier. Cette bizarrerie nous avait déjà interpellé dans l’article précédent mais il faudra retrouver le testament pour avoir des certitudes.

Liste des héritiers des époux Desmezières en 1851

En attendant, si l’Augustine du document ci-dessus est bien la future madame Belin, alors elle y est notée comme habitante de Carentan et non de St Vaast comme son père Henry.

Et si une relation affective privilégiée unissait les époux Desmezière à Augustine au point qu’elle vivait chez eux en 1851 cela expliquerait aussi :

Le Lieu Saint Jean, La Basse Addeville, Saint-Côme-du-Mont
  • que la maison de la rue de l’église à Carentan ne soit pas disponible, Augustine y réside sans doute encore;
  • qu’Augustine ait connu en voisine son futur mari Thomas Belin, Saint-Côme-du-Mont étant tout près de Carentan;
  • que Thomas Belin ait pu offrir l’hospitalité à ses futurs cousins par alliance à leur débarquement en Normandie,
  • et qu’Augustine et Thomas se soient mariés à Saint-Côme c’est à dire dans la commune de l’époux et non de l’épouse comme il est de tradition lorsque les époux habitent réellement chez leurs parents respectifs.

… P’tet ben qu’non.

mais en septembre 1851 nous sommes encore 4 ans avant le mariage de Thomas et d’Augustine. Elle n’a pas encore 18 ans, et Thomas, qui lui a 25 ans de plus, ne semble pas impliqué dans les affaires des Desmezières.

Plaque de cheminée
au lieu St-Jean marquée
Jacques François Belin
le père de Thomas Belin

Pourquoi alors se serait-il préoccupé de l’arrivée des Cauderlier ?

Peut-être tout simplement par défaut parce qu’il n’y a personne de la famille sur place sauf la très jeune Augustine et ses amis au nombre desquels Thomas fait peut-être déjà partie.

Rien de sûr donc sauf l’adresse où Thomas Belin et Augustine vont s’installer, vivre et mourir. Plusieurs actes nous précisent qu’ils habitent au “Lieu Saint-Jean”, hameau de La Basse Addeville (ou Appeville) à Saint-Côme-du-Mont.

Miroir et moulures
de la chambre d’Augustine
au lieu Saint-Jean
à Saint-Côme-du-Mont

C’est là que naîtra leur fils Georges le 13 mars 1873 et là qu’il décèdera à l’âge de 13 ans.

C’est là aussi qu’est décédé un an plus tard Thomas Belin le 4 mars 1887.

Augustine leur survivra plus de 20 ans. Et au lieu Saint-Jean il existe encore une pièce au rez-de-chaussée derrière la cuisine qu’on dit avoir été transformée en chambre dans un style néo-classique au début du 20ième siècle et ou vivait une vieille dame entourée de plusieurs chats or Augustine est décédée au Lieu Saint-Jean en 1908.

La tombe de Thomas Belin, Augustine née Lemaréchal et leur fils Georges à Saint-Côme du Mont

Thomas, Augustine et leur fils Georges auront la chance assez exceptionnelle que leur tombe soit protégée par la Conservation départementale des antiquités et objets d’art de la Manche.

Quant-au Lieu Saint-Jean, il est aujourd’hui un domaine comprenant un gîte pour les voyageurs et un havre de paix pour les chevaux. On peut remercier Cécile Graton, son actuelle propriétaire, d’avoir redonné à cette maison son nom historique, et de nous avoir offert le privilège de la visiter.

Car c’est peut-être bien la toute première adresse des Cauderlier en Normandie.

La Villa des Martyrs à Longues-sur-Mer

La Villa des Martyrs Longues-sur-mer
La Villa des Martyrs à Longues-sur-Mer, printemps 1909.

Une photo très populaire

Voici la photo ancienne la plus populaire chez les Cauderlier de Bayeux, les descendants de Léopold Cauderlier et Emélie Halley.

Il peut sembler normal qu’on la trouve agrandie, joliment encadrée et accrochée à Bayeux sur un mur de la maison de famille, qui était celle de Léopold et Emélie, même plus d’un siècle après la prise de vue.

Mais il paraît qu’elle figure aussi sur des murs à Bourges et à Grandcamp-Maisy, ce qui signifie que cette photo fait réellement parti du patrimoine familial partagé.

D’ailleurs en cliquant sur la photo ci-dessus vous pourrez vous aussi disposer d’une bonne définition pour la tirer et l’accrocher chez vous ! Et vous aurez raison de le faire car il faut bien reconnaitre que cette photo est exceptionnelle à plus d’un titre.

Vous me direz qu’avec une go-pro sur un drone la réalisation d’un tel cliché n’est qu’un jeu d’enfant, mais là au printemps 1909 on a peine à imaginer l’ingéniosité qu’il a fallu pour prendre cette photo d’extérieur en bord de falaise.

C’est qu’en 1909, seuls les professionnels font des photos. Lorsqu’ils tirent des portraits de famille, c’est en studio. Ce qui fait que cette image est tout simplement la plus ancienne que nous aillons en extérieur. Et un extérieur pas facile d’accès.

Cette photo est donc forcément une commande faite à un photographe professionnel par Léopold au crépuscule de sa vie. Il a réuni autour de lui sa famille au complet dans un endroit qui lui est cher et qui représente pour lui à la fois le travail et les loisirs.

Et s’il y a une chose dont on est sûr, c’est de la date de ce cliché. En effet à gauche nous avons André Cauderlier bébé qui est né le 25 mai 1908, et à droite Léopold Cauderlier qui décèdera le 26 mai 1909. Comme le bébé, pour tenir assis sur un cheval doit avoir au moins 6 mois et que la photo n’a pas été faite en plein hiver, nous en déduisons qu’elle date du printemps 1909.

Les personnages identifiés

Villa des Martyrs Léopold et Emélie Cauderlier
La Villa des Martyrs, détail 1. De droite à gauche Léopold et Emélie Cauderlier, leur fille Jeanne et peut-être leur belle-fille Marthe née De La Haye.

A droite de la photo sont assis Emélie et Léopold Cauderlier.

La femme assise avec le tablier à carreaux est sans doute leur fille Jeanne Boucher née Cauderlier.

La femme debout à gauche est peut-être Marthe Cauderlier née De La Haye, c’est ce que dit la tradition orale (André Cauderlier) même si elle ne se ressemble pas !

Ce qui est cocasse c’est que pour cette expérience photographique qui demande des poses longues et répétées et qui de surcroît est la première de leur vie, les personnages ont été invités à s’inventer des postures pseudo-actives qui conduisent Léopold à feindre de lire le journal de travers pendant que les femmes tiennent sans conviction entre leurs mains de supposés travaux d’aiguilles tout en regardant ailleurs.

Villa des Martyrs Familles Cauderlier et Boucher
La Villa des Martyrs, détail 2. Familles Cauderlier et Boucher

A gauche de la photo les jeunes hommes de la famille sont au complet.

Assis sur le cheval André Cauderlier père, qui n’a pas encore un an, est maintenu en place par son père Henri Cauderlier.

Devant eux je pense qu’il s’agit de l’aîné des fils Boucher, Georges Boucher fils.

Symétriquement aux Cauderlier, Georges Boucher père maintient en selle son plus jeune fils Léon, cette fois sur une bicyclette.

Le jeune garçon en bas à droite qui joue avec un chien serait Henri Boucher le cadet.

Il est notable que tous ces gens habitent au même endroit rue Echo à Bayeux.

Les personnages qui restent à identifier

La Villa des Martyrs, détail 3. Les personnages à identifier
Henri Cauderlier pratiquant son loisir préféré, la pêche à pied. 1930

Il reste au milieu de la photo trois personnages non identifiés, le cycliste aux beaux cheveux, le pêcheur à la haute taille et la petite brodeuse au tablier blanc, sans compter la femme debout qui est peut-être Marthe.

Le grand pêcheur nous rappelle que le loisir préféré de cette famille à cet endroit est la pêche à pied.

Il n’est pas possible que ces gens soient là par hasard alors que Léopold a commandé la réalisation de cette photo et de son tirage à la Librairie Deslandes de Bayeux. A cette époque ce sont souvent les libraires qui proposent les travaux photographiques et en vendent parfois les tirages sous forme de cartes postales.

Etre présent sur cette photo est une marque de familiarité et d’amitié.

Alors soit ces personnes sont de la famille, soit ce sont des intimes, amis ou employés.

Les personnages non identifiés sont trop jeunes pour être de la génération de Léopold. S’il avait en tête d’afficher la photo chez lui, il est légitime de rechercher des habitants de sa maison y compris des employés.

On peut s’essayer à lister les candidats.

Côté famille c’est simple on a 4 pistes : les cousins Cauderlier, les cousins Halley, les frères et soeurs Boucher et les frères et soeurs De La Haye.

A mon sens les 4 pistes sont possibles :

Chez les cousins Cauderlier le meilleur candidat serait Maurice Gancel dont on sait qu’il habitait chez Emélie en 1911. Il aurait alors environ 18 ans. Mais il y a aussi les cousins dont on ne connait pas de photo comme Arthur Cauderlier.

Chez les Halley, on sait qu’Ernest, un frère d’Emélie a vécu chez eux ; mais comme il aurait 55 ans à l’époque de la photo on doit plutôt chercher un de ses fils ou neveux.

Chez les Boucher, on sait que Georges Boucher est natif de Bayeux et a au moins un frère ainé Louis Joseph également bayeusain. Peut-être est-ce lui l’autre cycliste qui le tient par l’épaule.

Enfin chez les De La Haye nous avons Louis, frère ainé de Marthe qui vit à Bayeux quelques temps et qui est très grand, il faudrait savoir ce qu’il faisait en 1909.

Et puis il y a les intimes, en particulier les employés logés.

Là on a les recensements mais comme il n’y en a pas en 1909 nous devons nous contenter de ceux de 1906 et de 1911 pour nous donner des pistes.

Recensement de Bayeux 1906

En 1906, Emile Yon, Emile Catherine, Amédée Taillepied et Blanche Lenormand sont quatre candidats.

En 1911, ce sont Gustave Jeanne, Léopold Charles Taillepied et Delphine Lemarchand qui complètent la liste.

L’histoire de cette maison

Dans le dernier quart du 19ème siècle, alors que les Parisiens fortunés se font construire de splendides villas en style anglo-normand tout au long de la côte, Léopold décide de construire une “cabane” en dur sur la falaise de Longues-sur-Mer à un endroit où la vue est splendide, le décor sauvage et la mer riche en crustacés.

Le seul problème c’est que l’endroit à cette époque n’est pas accessible par des voies carrossables. On voit bien sur le plan cadastral que le chemin initial s’arrête en haut de la falaise.

Extrait du cadastre napoléonien de Longues. Archives départementales du Calvados

On raconte qu’il faut alors passer un fossé et un talus que pas même une brouette ne peut franchir. Tous les matériaux, poutres, pierres, tuiles et mortier seront donc acheminés à dos d’homme. C’est pourquoi à la fin du chantier Léopold baptise sa cabane la Villa des Martyrs.

Extrait de l’indicateur de Bayeux du 2 mai 1905.

On raconte qu’il fait une fête à l’achèvement des travaux avec ses compagnons charpentiers qui comptent de costauds gaillards (Léopold dirige alors une scierie rue St-Exupère à Bayeux). Après avoir bu plus que de raison l’un d’eux qui pesait un bon quintal n’était plus en capacité de regagner le haut de la falaise. Léopold chargea donc l’imprudent sur son dos comme il avait coutume de le faire avec les sacs de sel pour le remonter en haut de la falaise, une performance physique qui est restée légendaire.

Même les jours ordinaires il y avait de quoi se désaltérer dans la Villa des Martyrs, comme dans les autres “cabines de baigneurs” des falaises de Longues. C’est ce que nous apprenons au détour d’une série de cambriolages survenue dans la nuit du 28 au 29 avril 1905.

Connaitre plus précisément la genèse de cette maison est rendu assez compliqué par le fait que le terrain des falaises appartenait (et appartient sans doute toujours) à la commune de Longues-sur-Mer.

La construction a bien dû faire l’objet d’un permis puis des taxes et des loyers ont été payés à la ville de Longues, mais je n’ai pas trouvé Léopold dans les tables cadastrales de Longues-sur-Mer. Cela peut être dû au fait qu’il n’était pas propriétaire du terrain.

Sans le cadastre il devient difficile de repérer l’emplacement précis de la maison, d’autant plus qu’elle a été consciencieusement démolie par les forces militaires allemandes qui voulaient effacer tout point de repère visible du ciel lorsqu’eux aussi découvrant cette jolie vue dégagée sur la mer décidèrent d’y construire quelques bâtiments qu’on appelle les batteries de Longues.

Mais avant la destruction nous avons encore sur le plan cadastral des bâtiments numérotés 103, 104, 105, 106 et 107 construits à flanc de falaise.

Extrait du cadastre de 1940 de Longues. Archives départementales du Calvados.

On remarque tout de même que la maison est construite sur un replat à mi-hauteur dans la falaise.

Il existe encore aujourd’hui de tels replats dans la falaise de Longues, même si d’autres ont pu s’écrouler sous l’effet des vagues qui poursuivent sans relâche le travail de pilonnage initié dans cette zone lors du débarquement.

La falaise de Longues vue depuis la mer. Google earth.

L’emplacement est peut-être là ou peut-être a-t-il totalement disparu.

Vente de la maison

Les familles Cauderlier, Lagouche et Gancel à Ver-sur-Mer, Août 1925.

Mais avant d’être démolie la maison avait été vendue par les héritiers de Léopold au cours de la licitation de ses biens.

La famille d’Henri avait, semble-t-il, délaissé cette maison au profit d’une cabine de bain en bois cette fois construite en bord de mer à Ver-sur-Mer.

De leur côté les enfants Boucher avait pris attache à Grandcamp.

Et puis peut-être les falaises de Longues étaient-elles devenues trop dangereuses pour les enfants.

La maison est donc mise en vente aux enchères publiques.

Extrait de l’Indicateur de Bayeux du 5 janvier 1923.

L’annonce parait dans la presse locale le 5 janvier 1923. La maison y est mise à prix 50 francs, une misère, de l’ordre de 750 euros d’aujourd’hui.

Elle est vendue le 20 janvier 1923 pour 450 francs à Monsieur César Dubreuil, agriculteur à Monceaux.

On peut se dire que vendue 9 fois sa mise à prix, il y a eu pluralité d’enchérisseurs.

Extrait du document “Partage des successions de Monsieur et Madame Cauderlier-Halley”.
Archives départementales du Calvados.

Il ne sera pas dit qu’Henri Cauderlier, qui a racheté la plupart des autres lots de cette vente, aura laissé partir la Villa de coeur de son père sans enchérir.

Puis la municipalité de Longues vient réclamer 60 francs de loyer à Mme Emélie Cauderlier pour l’année 1923, la maison n’ayant été vendue que le 20 janvier et le loyer étant dû pour l’année entière au locataire du 1er janvier.

Courrier de la mairie de Longues du 21 décembre 1924 à Madame Emélie Cauderlier.
Archives départementales du Calvados
Quittance du dernier loyer pour la “location de falaise” à la commune de Longues le 30 décembre 1924.
Archives départementales du Calvados

Après une année entière de vaines tentatives de négociation la réponse de la mairie le 24 décembre 1924 est sans appel : il faut payer, joyeux noël !

Henri paye donc le 30 décembre 1924 pour sa mère la somme de 60 francs à la maire de Longues auquel s’ajoute le timbre de 25 centimes.

Ce loyer peut sembler fort cher comparativement à la valeur du bien.

Mémo notarial où l’on retrouve la somme payée au titre de dernier loyer pour le terrain de la falaise de Longues.
Archives départementales du Calvados

L’année suivante en avril 1925 on retrouve en dernière ligne du mémo adressé au notaire la somme de 60,25 francs dans la liste des frais supportés par Henri pour le compte de sa mère .

Finalement le montant du loyer, les cambriolages et la dangerosité de la falaise auront eu raison de l’attachement familial à cette petite maison et il n’y a rien à regretter lorsqu’on sait qu’elle sera détruite par l’Occupant une quinzaine d’années après sa vente.

Conclusion

Quelques jours avant sa mort Léopold nous laisse cette photo devenue iconique comme le témoignage d’une partie de sa vie qui a totalement disparue.

Il nous reste par ailleurs pas mal de souvenirs de Léopold, y compris dans des bâtiments où il a oeuvré mais de cette photo plus rien ne subsiste, ni les lieux, ni les gens, ni ce qu’ils pensent ni ce qu’ils font.

Pour nous cette photo c’est Le Passé, ce qui explique peut-être l’attachement que nous portons à ce cliché.

Un jour à la campagne à Gaël en 1954

Gaël 1954

C’est dans les album photos de Tante Denise à Bayeux qu’on retrouve 4 photos d’une belle journée passée en 1954 à Gaël.

Jules Le Barbey, sa femme Henriette, leur fils Jean, sa belle soeur Denise et sa belle-mère Marthe sont venus voir la famille de Jules à Gaël.

Gaël 1954

En constatant que sur chacune des photos il manque soit tante Denise soit Jules on en déduit qu’ils sont 2 photographes à se partager le même appareil photo, sans doute celui de Tante Denise, puisque c’est dans son album qu’on retrouve ces photos.

Gaël 1954

Sont-ils venus en voiture ? sans doute.

Ont-il fait une escale lors d’un circuit plus vaste ou sont-ils venus exprès ?

Pourquoi Nizou n’est-elle pas là ?

Comment s’est déroulé cette journée ?

Devant la maison à Gaël en 1954

Ces gens là se connaissent-ils bien ? se voient-ils souvent ?

Et surtout et avant tout qui sont les autres personnes que nous avons là ?

Il y a cette dame juste devant Marthe.

Avec son tablier on dirait bien qu’elle est chez elle.

Et puis il y a ce monsieur en sabots qui a l’air d’être chez lui, lui aussi.

Et aussi les trois autres qui forment comme une petite famille.

J’ai bien une idée mais il faudrait être sûr…

A compléter, …

Rue Holgate à Carentan (Manche)

Dans le dernier article je vous entretenais des cartes postales adressées à Estelle Bouthreuil, rue Holgate à Carentan.

A ce jour j’ignore à quel numéro de la rue Holgate se situait la dernière adresse d’Estelle Bouthreuil, mais je sais que c’est une maison de famille où étaient installés ses parents, où elle est née ainsi que ses 10 frères et soeurs et où sont morts un bon nombre d’entre eux.

En farfouillant dans les copies de documents notariés faites aux archives du Calvados cet été, j’ai trouvé une petite phrase qui m’a permis de situer dans cette même rue Holgate l’hôtel qu’exploitaient à Carentan les parents d’Emelie Halley, la femme de Léopold Cauderlier…

Extrait de la licitation entre les 6 enfants de Jules Halley Maître d’Hôtel à Carentan le 25 septembre 1885.
Archives départementales du Calvados.

… tout simplement en recherchant l’Hôtel de France maintenant que j’avais son nom. ( Note personnelle : j’adore les Hôtels du Lion d’Or et les Hôtels Bellevue mais mes préférés restent les Hôtels de France).

Fort donc de ces précieuses informations je me mets en quête d’une carte postale ancienne et, coup de chance, j’en trouve une, qui plus est avec l’inscription du nom du propriétaire E. Halley.

L’Hôtel de France, Rue Holgate à Carentan c.1890

E comme Edouard, un frère d’Emelie qui a donc pris la suite de ses parents après leur disparition en 1883 et 1885.

Je me demande donc ce qu’est devenu ce bâtiment.

Après des heures à arpenter virtuellement sur Google street-view de haut en bas l’interminable rue Holgate, j’ai fini par identifier l’emplacement grâce aux maisons d’en face. Car malheureusement l’Hôtel a visiblement été détruit et remplacé par un bâtiment du plus pur style Reconstruction.

Le 29 rue Holgate à Carentan (50) aujourd’hui. Google Street View

Cet immeuble n’est plus un hôtel mais un commerce et des bureaux, les locaux de services en sécurité privée appelé “Cotentin Manche Sécurité Protection”, CMSP pour les intimes.

Côté Manche – Vincent Giard- le 24 Sep 2020 

Tiens ce nom me dit quelque chose !

C’est que par curiosité j’avais recherché dans l’annuaire les Bouthreuil vivant actuellement à Carentan, et je n’en ai trouvé qu’un, prénommé Olivier et qui se trouve être le gérant de l’entreprise CMSP, sise à l’emplacement de l’ex hôtel de France !

Comme nous connaissons tous les descendants nommés Bouthreuil rescapés de la fratrie née rue Holgate, il faut admettre qu’Olivier est un cousin encore plus éloigné.

Si ça continue je vais créer une nouvelle catégorie dans ce blog, la catégorie “coïncidences”.

Et ce n’est pas fini car le sens de l’hospitalité qu’Eveline Risler a hérité de son arrière-arrière-arrière-grand-père Jules Halley, maître de l’Hôtel de France sis 29 rue Holgate à Carentan saura sûrement s’exprimer prochainement jusqu’en Haute-Savoie pour les lointains cousins vivants maintenant au dit-lieu. (comprend qui peut, sinon c’est pas grave).

Auvers, un château “peau de chagrin” pour soigner les chagrins

Le château d’Auvers dans la Manche. Gravure du 17ème ou du 18ème siècle.

Pendant des siècles, le château d’Auvers près de Carentan dans la Manche ne fait pas parler de lui.

Pas de riche mécène, ni d’illustre occupant, pas même de fiche historique sur wikipedia.

On trouve seulement des représentations graphiques qui tristement présentent un bâtiment d’autant plus petit que l’image est récente.

Le Chateau d’Auvers vers 1910.

Il n’en reste aujourd’hui que le pavillon central, propriété privée réputée pour son activité équestre.

Quoiqu’il advienne de ses murs, le château garde une part de son identité. D’où la tient-il ? De sa toiture bien sûr, mais également de son double escalier, même s’il est devenu maintenant assez incongru pour un si petit bâtiment.

Le château d’Auvers près Carentan dans la Manche aujourd’hui.

C’est que l’escalier a toujours été le point focal du château.

Et c’est tout naturellement devant cet escalier que tout le monde se prend en photo au début du 20ème siècle.

La quantité de photos faites devant cet escalier est juste incroyable.

Découvrons-les ensemble …

Les familles Lagouche et Bouthreuil à Auvers

De gauche à droite les deux plus jeunes des enfants, Marcel et Madeleine Lagouche, puis les deux soeurs Suzanne Bouthreuil et Marie-Louise Lagouche née Bouthreuil, et enfin les deux enfants aînés Suzanne et Charles Lagouche. Château d’Auvers entre 1913 et 1919.

Malgré le petit air d’exotisme donné par le palmier, la joie ne semble pas à son comble dans cette famille. Et pour cause, parce que s’ils sont là, c’est qu’après le décès du père de famille Charles Lagouche le 28 novembre 1907, sa veuve Marie-Louise et ses 4 enfants ont dû se débrouiller seuls.

Suzanne et Hortense Bouthreuil à Auvers c. 1910

Au départ, ils restent à Caen, ils quittent juste leur restaurant du 68 boulevard St-Pierre pour un appartement au 20 rue Saint-Jean. En septembre 1910, Charles, l’ainé, trouve un travail de journaliste au journal L’Auto, l’ancêtre de L’Equipe : il doit suivre un régiment pendant de grandes manoeuvres. Lui qui n’aime rien tant que de bouger est ravi. A cette occasion il se perfectionne en technique photographique. Puis fin 1911, Marie-Louise et ses enfants quittent la Normandie et montent à Paris au 14 rue de la Perle. Début 1914, Marie-Louise et ses filles s’installent 13 Rue Custine dans le 18ème mais pour peu de temps semble-t-il. Elles y reviendront après la guerre.

Car avec la guerre les choses se sont compliquées. Est-ce la peur d’être assiégée dans Paris comme c’est arrivé à d’autres en 1870, où celle de manquer de nourriture qui pousse Marie-Louise à retourner en Normandie ? Toujours est-il qu’elle est recueillie avec ses enfants par sa soeur, Suzanne Bouthreuil, qui dirige l’Institution Notre-Dame, autrement dit le pensionnat de jeunes filles installé à Auvers.

Pensionnat Auvers circa 1914.
On reconnait Madeleine Lagouche en haut à gauche et Suzanne en haut à droite.

Ce n’est pas la première fois ; déjà en 1905 leur mère à toutes deux Hortense Bouthreuil née Cauderlier était venue, elle aussi, trouver refuge à Auvers après la mort de son mari Paul. Et c’est d’ailleurs à Auvers qu’Hortense en décédée en 1912.

A leur arrivée, il semble que les deux filles Suzanne et Madeleine soient affectées au pensionnat, puisqu’on les reconnait sur une photo de groupe. Les garçons ne sont pas là en permanence, Marcel est mobilisé presque en continu et Charles est mobilisé l’été 1917 et travaille toujours en pointillé pour le journal.

Puis les locaux du pensionnat sont semble-t-il réquisitionnés comme hôpital militaire. Le château devient havre de paix pour quelques soldats blessés.

L’Hôpital militaire d’Auvers

Lorsqu’il est à Auvers, le fils ainé Charles Lagouche utilise ses compétences photographiques pour faire des photos de groupes, soit dans les espaces de vie comme ci-dessus, soit …

Hôpital militaire d’Auvers (Manche) entre 1914 et 1919 avec au premier rang, au milieu Suzanne Bouthreuil et à côté à gauche peut-être Mr Roy avec son képi 77 et à droite l’homme dit “à la médaille”, et ma grand-mère Suzanne au milieu en haut.

… en bas de l’escalier de droite du château bien sûr comme ci-dessus et ci-dessous.

Hôpital militaire d’Auvers (Manche) entre 1914 et 1919

Et on retrouve sur ces photos de groupe, sa soeur, ma grand-mère, la jeune Suzanne Lagouche en aide-soignante débutante (au milieu en haut sur la première photo et en bas à gauche sur la seconde). Sa tante Suzanne Bouthreuil en patronne de l’institution est toujours en bas au centre.

Pour l’occasion, les soldats se sont faits beaux et on constate alors qu’ils viennent du 32ème, du 319ème, du 37ème, du 77ème, du 69ème, du 236ème, …

Ils ont des uniformes variés, ils viennent sans doute aussi de régions différentes et de milieux sociaux différents.

Hôpital militaire d’Auvers (Manche) entre 1914 et 1919
A l’arrière de cette photo il est écrit : “Soldats de l’hôpital d’Auvers en paysans normands”

Au début les blessés étaient une vingtaine et les soignantes 4.

Il semble qu’ensuite ils soient une trentaine de blessés pour 5 soignantes.

Pourquoi penser que cette photo est ultérieure au deux autres ?

A cause du lierre sur le mur, qui est semble-t-il plus fourni sur cette dernière photo que sur les précédentes.

On note aussi que d’une photo sur l’autre les blessés sont presque tous différents, c’est, sans doute, qu’en 4 ou 5 ans ils se sont souvent renouvelés.

De toute façon, ce qui les réunit là, c’est l’absurdité d’une guerre et la chance de ne pas être mort sur l’un ou l’autre des nombreux champs d’honneur.

Les commandes de la carte postale n°7 d’Auvers

Cela peut paraitre étonnant mais malgré les circonstances, on s’amuse aussi parfois et c’est l’occasion de faire une photo, toujours en bas et à droite de l’escalier emblématique devant le palmier bien sûr.

Comme le matériel photographique coûte cher, Charles Lagouche se finance en vendant ses photos tirées en cartes postales et il réalise des tirages à la demande pour les photos où figurent des soldats reconnaissables.

On trouve ainsi derrière certaines épreuves le nombre d’exemplaires commandés par les différents soldats représentés.

Charles fait aussi des portraits et même son auto-portrait, où-çà, bah en bas de l’escalier, tiens !

Selfie de Charles Lagouche à Auvers été 1917

Les évènements familiaux

Communiante à Auvers circa 1914

Et puis on a aussi des photos faites à l’occasion d’évènements familiaux, communion sûrement, baptême et funérailles peut-être.

Toutes ces photos, visiblement faites à Auvers, sont de la même facture.

Elles sont tirées sur le même papier que les photos précédentes de l’hôpital. On en déduit qu’il est probable qu’elles aient été faites par la même personne à savoir Charles Lagouche.

Prenons cette communiante par exemple : pour l’occasion on a crû bon de décorer l’escalier du château d’une statue religieuse.

Et on retrouve cette statue au même endroit sur une photo de Marie-Louise, et comme Marie-Louise tient un livre à la main on en déduit qu’elle est sans doute la marraine de la petite, donc de sa famille, sa tante par exemple.

Marie-Louise Lagouche à Auvers un jour de communion

Et si l’on suppose que ces photos ont été prises entre 1910 et 1920 et que cette communiante est de la famille, ce ne peut être que Agnès Bouthreuil née en juin 1899 ou sa petite soeur Denise Bouthreuil née en 1904. Nous savons que toutes deux ont fréquenté le pensionnat que dirige leur tante Suzanne à Auvers car nous avons des photos d’elles en uniforme du pensionnat.

De plus Nous avons une photo de cette communiante avec des personnages que l’on peut imaginer être son jeune frère Edouard et sa mère Berthe née Drouet.

Le look du jeune Edouard surprend un peu : cheveux longs, broderies au col et aux poignets … Pour un futur colonel ça fait tout drôle. Mais c’était la mode au début du 20ème siècle et on trouve de tels costumes aussi chez d’autres garçons de la famille à la même époque, je pense notamment au jeune Léon Boucher à Bayeux , et aux fils de Jules Cauderlier à Carentan et même à mon beau-père Raymond Chernet qui portait un habit strictement identique.

Edouard, Berthe et Denise Bouthreuil à Auvers. Circa 1914

Comme on ne peut pas croire qu’il n’y a que 2 ans d’écart d’age entre ces deux enfants là, il faut retenir que la communiante est l’ainée Agnès née en 1899. Nous sommes donc en 1909, 1910 ou 1911, c’est à dire avant la guerre et avant que les uns et les autres ne viennent vivre à Auvers.

On a aussi d’autres photos de famille au Château d’Auvers cette fois pendant la guerre.

Un jour de fête sans doute, Marcel est en permission, tout le monde est bien habillé. Il ne fait pas très chaud, c’est Noël peut-être.

Sur la photo de droite on a Marie-Louise fièrement entourée de ses 4 beaux enfants.

Madeleine,Suzanne, Marie-Louise,Charles et Marcel Lagouche, Auvers

Sur la photo ci-dessous ce sont exactement les même personnes, le même jour au même endroit. Seul le châle qui était posé sur la rambarde à droite en montant dans l’escalier est maintenant à gauche.

Mais surtout il y a deux personnes de plus : Tante Suzanne la patronne des lieux et cette jeune fille à gauche qui pourrait être Agnès Bouthreuil notre communiante et qui serait donc légèrement plus jeune que les filles Lagouche Suzanne et Madeleine ce qui parait tout à fait plausible.

Mais ce n’est qu’une hypothèse et il peut aussi s’agir d’une autre jeune fille.

Les familles Lagouche et Bouthreuil au Château d’Auvers (Manche) entre 1914 et 1919

Un autre jour au même endroit il se passe semble-t-il quelque chose de beaucoup plus triste. C’est qu’à Auvers nos familles ont aussi perdu des leurs.

La grand mère Hortense Bouthreuil née Cauderlier est décédée à Auvers en 1912.

Puis la petite Denise Bouthreuil est décédée de la grippe espagnole à Auvers en 1918, quelques semaines après la mort de son père Edouard Bouthreuil (père).

Serait-ce donc la jeune soeur de notre communiante que l’on enterre 7 ou 8 ans plus tard ?

Sur la photo ci-dessus prise à un endroit désormais familier on dénombre 6 femmes en grand deuil.

Trois nous sont maintenant bien connues. Si nous les numérotons de gauche à droite il s’agit en numéro 2 de ma grand-mère Suzanne Lagouche, en 3 de sa mère Marie-Louise et en 6 de Suzanne Bouthreuil directrice de l’institution.

Sur la photo de droite nous avons les mêmes personnes excepté que la jeune Madeleine a remplacé sa soeur Suzanne Lagouche.

Qui pourraient-être les trois autres femmes en noir de ces photos?

S’il s’agit bien de l’inhumation d’une fille Bouthreuil, il faut chercher du côté de sa mère Berthe née Drouet qui pourrait en 1918 être accompagnée de sa soeur Juliette et de leur mère Victorine Drouet née Brione.

Le couple aux jumelles et les femmes Lagouche vers 1914, peut-être au baptême des jumelles.

Mais cela peut aussi être l’inhumation de notre communiante Agnès, institutrice, qui décède un peu plus tard en 1920 à Carentan d’une péritonite. Les personnes présentes sur la photo seraient alors potentiellement les mêmes.

Enfin cela peut-être tout à fait autre chose car rien n’est documenté de façon sûre ici.

Et puis il y a le mystère du couple aux jumelles.

Les parents et leurs deux filles sont photographiés à deux reprises à l’extérieur.

Tout le monde est bien habillé comme s’il s’agissait d’une occasion particulière.

Le couple aux jumelles, Marie-Louise et Madeleine Lagouche vers 1918.

Et nous sommes à une époque où les Lagouche – au moins les femmes – vivent à Auvers.

On les voit au début toutes petites, peut-être le jour de leur baptême, dans les bras de leurs parents, avec les femmes Lagouche, leurs marraines peut-être.

Puis on les retrouve en petites filles de 4 ou 5 ans toujours avec des femmes Lagouche (Madeleine et Marie-Louise).

Mais je ne connais pas de jumelles dans la famille, et les photos ne sont pas prises dans notre escalier préféré. Il n’est donc pas certain que l’on soit bien à Auvers.

Les seules jumelles que nous connaissions sont celles du second mari de Louise Lagouche (1858-1919) qui s’appelait A. Lesauvage et était veuf et père de 4 enfants dont deux jumelles. L’ennui c’est que ces jumelles-là seraient beaucoup plus âgées que celles de ces photos.

Les amis d’infortune

Théatre à Auvers entre 1914 et 1919.
Une des plus jolies vues de l’escalier.

Il y a d’autres personnes et même d’autres familles échouées à Auvers pendant cette guerre.

Du point de vue photographique, il semble que la famille et les amis d’infortune ne se mélangent pas avec les soldats blessés.

Tout se passe comme si les “permanents” avait chacun un rôle dans l’activité de l’hôpital et un loisir commun, le théâtre, qu’ils pratiquaient pour distraire les blessés “de passage”.

Mr et Mme Roy à Auvers entre 1914 et 1919

Comme nous l’avons vu, les blessés changent souvent.

Cela permet sans doute de renouveler l’auditoire et de faire quelque économie de moyen sur le répertoire théâtral…

Même Suzanne Bouthreuil, religieuse (ou ancienne religieuse) se mêle à l’action !

L’action qui se passe où ?

A droite en bas de l’escalier du château d’Auvers, bien sûr.

Qui sont donc les acteurs de ces pièces de théâtre ?

Tout d’abord il y a les époux Roy.

Les familles Lagouche et Roy réunies de nouveau le 1er janvier 1921 quelque part mais pas à Auvers.

Monsieur Roy est militaire de toute évidence et il ne quitte guère son uniforme que pour jouer au théâtre.

Il est probable qu’un militaire avait la responsabilité de l’hôpital militaire d’Auvers, médecin peut-être ou simplement gradé en charge d’enregistrer les mouvements et les affectations des uns et des autres.

Comment savons nous leur nom à coup sûr ?

Le verso de cette carte de voeux

C’est que un peu plus tard, le 1er janvier 1921, les Lagouche et les Roy fêteront la nouvelle année tous ensemble quelque part.

A cette occasion ils ont signé une photo d’eux qu’ils n’ont pas envoyée.

Nous l’avons donc retrouvée un petit siècle plus tard dans les affaires de Charles qui en était sans doute l’auteur très habile.

Très habile car il a fallu faire la photo puis la tirer sur papier, que le papier sèche pour faire signer tout le monde avant qu’ils ne rentrent chez eux. C’est plus cool aujourd’hui avec WhatsApp.

Et tout çà pour ne pas l’envoyer !

Peut-être que la présence des 2 jeunes filles (qui sont sans doute soeurs vu qu’elles portent exactement la même robe, à l’instar des soeurs Lagouche) risquait d’être mal perçue par la destinataire c’est à dire Suzanne ?

On comprend pourtant facilement qu’ils aient voulu témoigner leur affection à celle qui les avait fait se rencontrer en leur offrant à tous l’hospitalité (c’est bien le mot qui convient) en ces années terribles encore dans toutes les mémoires.

Le jeune homme à la médaille

Ensuite on trouve un couple que l’on ne voit que sur ces scènes de théâtre.

Et puis enfin il y a des personnes qui sont acteurs de théâtre et sont photographiées seules.

Ainsi ce jeune homme dont on a un portrait. Il y porte une tenue un peu étrange mi-militaire mi-civile avec une médaille militaire.

Lui aussi joue au théâtre. Il est aussi peut-être sur la carte postale numéro 1 ci-dessous.

Enfin il y a cette demoiselle, “la jeune fille à l’escalier du château d’Auvers”.

Il me semble que c’est la cinquième soignante apparue sur la troisième photo des blessés ci-dessus.

Tout deux faisaient donc partie du staff de l’hôpital d’Auvers pendant cette période.

La jeune fille à l’escalier du château d’Auvers près Carentan 1914-1919

Datation au carbone 1914-18

Carte numéro 0, Le Chateau d’Auvers vers 1910

Tout le monde le sait, rien de tel que les végétaux fossilisés sur des photos pour dater les évènements.

Ici nous avons 3 végétaux importants, le grand arbre au fond à gauche du château, les palmiers devant l’aile droite du château et le lierre.

Sur la carte postale ancienne la plus courante du château (carte numéro 0), faite en hiver on voit un très grand arbre, qui semble couvert de lierre dans sa partie basse et qui occulte la vue. On remarque aussi entre les 2 fenêtres de droite de l’aile du château un tout jeune palmier. Il n’y a pour ainsi dire pas de lierre sur le mur du château.

Carte numéro 1, Le château d’Auvers entre 1914 et 1919

Mais il existe aussi un jeu de 3 cartes postales numérotées. La première représente le château sous un angle très proche de la carte précédente mais le grand arbre du fond a disparu. les palmiers ont bien grandi et du lierre a poussé sur le mur.

Nous sommes sûrs que ce jeux de cartes ont été faites par Charles Lagouche donc probablement entre 1914 et 1919 car nous avons trouvé dans ses affaires des tirages de ces photos sans impression du texte.

Détail de la carte postale numéro 1, Château d’Auvers près Carentan (Manche) entre 1914 et 1919

Et si on agrandit ces tirages originaux on découvre de nombreux personnages presque invisibles à l’oeil nu. On reconnait des soldats, des soignantes et même Marie-Louise Lagouche, toujours en robe noire, ici en grande conversation près de la porte avec madame Roy semble-t-il.

Carte numéro 2, Le pavillon du château d’Auvers 1914-1919

D’ailleurs je ne serais pas surpris que ce soit Monsieur Roy assis devant sur le muret et son jeune collègue de théâtre qui arrive de la droite, l’homme à la médaille.

Sur la carte postale numéro 2 intitulée Pavillon du château on constate que les militaires blessés sont nombreux et qu’ils y sont comme chez eux car ils sont assis sur les appuis de fenêtres.

Aucun doute c’est là qu’ils logeaient, on voit même un lit d’hôpital par une fenêtre du premier étage.

Carte numéro 3, Pensionnat des Sacré-Coeurs de Jésus et de Marie – Cour extérieure et dépendances 1914-1919

La troisième carte de la série est une vue extérieure du pensionnat.

C’est une vue animée par des pensionnaires qui sortent et s’étonnent de l’attirail du photographe.

A en croire cette série de cartes, le pensionnat serait donc resté opérationnel à Auvers en même temps que l’hôpital.

Le même endroit aujourd’hui

J’ai tendance à penser que cela n’est vrai qu’au début, en 1914 et qu’ensuite le pensionnat a dû être rapatrié au centre de Carentan, laissant des espaces pour accueillir plus de blessés.

C’est qu’en regardant bien les photos des blessés on constate que leurs lieux de vie sont meublés comme des écoles : pupitre, tableau noir et vestiaire à hauteur d’enfant.

Carte numéro 7. Remarquez les pupitres et les vestiaires, nous sommes clairement dans une ancienne salle de classe du pensionnat d’Auvers transformée en mess. Et on connait le nom de ces 5 personnes qui ont passé commande de copies de cette carte (voir ci-dessus).

La guerre finie, et les derniers blessés rentrés chez eux, la famille Lagouche rentre à Paris au 13 rue Custine.

Marie-Louise et Suzanne Lagouche devant le château d’Auvers c.1927.
Ici devant le pavillon du château d’Auvers près Carentan circa 1927.

Puis ils reviennent à Auvers, sans doute à l’occasion du décès de Suzanne en 1927.

Je n’ai pas l’acte de décès de Suzanne Bouthreuil qui n’est pas accessible en ligne et a pu être détruit en 1944, mais elle n’est pas présente sur ces photos et nos dames sont en tenue de deuil.

Nous voyons bien que le palmier, qui ne dépassait pas le haut de la fenêtre du rez-de-chaussé sur la carte postale numéro 1 faite vers 1914, atteint maintenant le milieu du premier étage !

Le troisième cliché de ce même jour.

Voici les trois clichés que nous avons de ce jour là.

Et qui prend ces photos me direz-vous?

Hé bien il n’y a que Charles pour faire ce genre de cliché.

Il n’y a que lui dont on accepterait la présence dans de telles circonstances.

Suzanne Bouthreuil est enterrée avec ses parents au cimetière de Carentan.

Ainsi s’achève l’aventure à Auvers près Carentan de Suzanne Bouthreuil, de sa soeur Marie-Louise Lagouche et de ses 4 enfants Charles le photographe, Suzanne la soignante improvisée, Marcel le militaire et la jeune Madeleine.

L’escalier du château d’Auvers 1914-1919.
De gauche à droite
Marcel et Madeleine Lagouche,
Peut-être Berthe et Agnès Bouthreuil,
Le couple aux jumelles,
Marie-Louise Lagouche

Et moi il ne me reste qu’un souhait …

… celui de faire …

… comme beaucoup dans ma famille …

… un beau selfie sur cet escalier.

Les questionnements :

Qui est la communiante ?
Est-ce bien Agnès Bouthreuil ?

Qui sont les parents des jumelles nées vers 1913 ?

Qui sont les femmes en deuil ?
Sont-ce Berthe, Juliette et Victorine Drouet ?

Qui sont les personnes photographiées seules et le couple qui joue du théatre?


Visite des cimetières de Bayeux, Carentan, Méautis et Donville

Le 5 septembre 2020

Nous nous rendons d’abord au cimetière de Bayeux Saint-Exupère, puis à celui de Carentan.

A Bayeux, nous photographions les tombes familiales.

A Carentan, je vais droit vers les tombes de Paul et Hortense Bouthreuil, voisine de celle de leur fils Edouard (père), sa femme Berthe et leurs deux filles décédées très jeunes Agnès et Denise. La tombe de Jules Cauderlier et Marie Yvelande est toute proche aussi. Elle fait l’objet d’une reprise par la mairie 50 ans après le décès de de Marie Yvelande en 1967.

A Sébeville, nous retrouvons l’église et un beau château voisin. Le cimetière est presque vide. Tout au fond, des tombes qui paraissent être celles d’enfants, mais pas de mention du nom d’Eugène Cauderlier. C’est peut-être trop ancien.

Nous allons ensuite à Méautis. Le manoir de Donville est devenu un mémorial de la 2de Guerre mondiale. Les deux cimetières sont paisibles, mais je n’y retrouve pas de Bouthreuil.

Recensement rue aux Coqs de 1876 à 1926

Je découvre de sites internet qui facilitent la généalogie :

– les archives de la Manche https://archives-manche.fr

– les recensements dans les archives du Calvados permettent de suivre une adresse et de voir qui était là. https://archives.calvados.fr

Les recensements mettent en lumière les liens, les foyers, les attachements, le réconfort recherché après les coups du sort.

En suivant le 19-21 rue aux coqs à Bayeux :

Il y a pas mal de gens de la famille qui y ont passé et qui y travaillaient comme commis :

Arthur Cauderlier

Ernest Halley (fils ou neveu d’Amélie Adélaïde Halley)

Quand tante Denise est pensionnaire elle n’est plus dans la liste

Il y a parfois l’âge, le lieu de naissance.

On découvre des infos qu’on ignorait :

Georges Auguste Boucher mari de Jeanne, gendre de Léopold, est typographe au journal de Bayeux

en 1926

Leur fils Henri est employé de commerce de son oncle Henri Cauderlier

Berthe Hopquin apparaît en 1921 comme domestique, précédée de Delphine dont parlait mon père, qui avait dû laisser un souvenir dans la famille.

En 1936 Henriette est partie avec son mari, mais Denise et Berthe sont là.

Recensement de 1876

Rue Echo 19-21

Cauderlier Léopold Chef de famille marchand de sel 29 ans né à Gussignies (Nord)

Halley femme Cauderlier Amélie Adélaïde sans profession 32 ans née à Briquebec (Manche)

Cauderlier Jeanne Léopoldine 6 ans née à Bayeux

Cauderlier Henri Jules 3 ans né à Bayeux

Torquet Rosalie Catherine 26 ans cuisinière née à St Pierre Manche

Cauderlier Arthur employé de commerce 17 ans né à Carentan Manche

Marion Charles domestique 18 ans né à La Cambe Calvados

Commentaire : Léopold n’a que 29 ans et il est déjà propriétaire (ou locataire ? ) de cette maison ! J’avais toujours en tête l’image d’un homme mûr à l’achat de la maison.

Sa fille Jeanne est née à Bayeux en 1870, cela fait donc plusieurs années qu’ils sont là. Il a déjà établi son commerce de sel. C’est sans doute Henri le premier à naître dans la maison. Je recherche l’acte de naissance de Jeanne : en novembre 1870, la famille habite rue St-Patrice à Bayeux, et Léopold est déjà marchand de sel.

Recensement de 1881

Cauderlier Léopold négociant chef de famille 35 ans

Halley femme Cauderlier Amélie Adélaïde sans profession 38 ans

Cauderlier Henri Jules 9 ans fils

Cauderlier Jeanne Léopoldine 12 ans fille

Richard Aimé Jean-Pierre 23 ans employé

Commentaire : les domestiques n’habitent plus avec eux, à moins qu’ils n’en aient plus.

Recensement de 1886

19 rue Echo

Jeanne Alexandre chef de famille administrateur d’imprimerie 60 ans

Hamelin Olympe sans profession 60 ans

Commentaire : le 19 a été loué. Y a-t-il un lien entre cet administrateur d’imprimerie et Henri Boucher qui sera typographe et habitera la même maison après son mariage avec Jeanne Cauderlier ?

21 rue Echo

Cauderlier Léopold commerçant chef de famille 38 ans

Halley femme Cauderlier Amélie Adélaïde soins du ménage 41 ans

Cauderlier Henri 12 ans fils

Cauderlier Jeanne 15 ans fille

Lesénécal Désiré 19 ans domestique employé

Recensement de 1891

21

Cauderlier Léopold commerçant chef de famille 43 ans

Halley femme Cauderlier Amélie sans profession 45 ans

Cauderlier Henri 17 ans fils

Cauderlier Jeanne 20 ans fille

Halley Ernest tailleur beau-frère

Laisné Alexis 17 ans sans profession neveu

Delalande Désiré 17 ans employé

19 rue Echo

famille Gosselin Aristide et Henriette 29 ans, fils Henri 5 ans

Commentaire : Le 19 est toujours loué. Deux membres de la famille s’installent au 21 : Ernest Halley et Alexis Laisné. Ils ne participent pas à l’activité économique, mais peut-être sont-ils en location.

Les relations avec les Laisné puis les Gancel trouvent leur source dans cette cohabitation.

Recensement de 1896

21

Cauderlier Léopold commerçant chef de famille 48 ans

Halley femme Cauderlier Amélie Adélaïde sans profession 50 ans

Cauderlier Jeanne Léopoldine 25 ans fille

Loisel Edouard Victor 30 ans employé

19

Marie Veuve Bacon Radegonde 62 ans sans profession chef de famille

Commentaire : le 19 est toujours loué. C’est l’année du mariage de Jeanne. Supposition : Henri a 23 ans et il est peut-être sous les drapeaux.

Recensement de 1901

19-21

Cauderlier Léopold Joseph chef de famille 54 ans voyageur

Halley femme Cauderlier Emelie Adélaïde sans profession 56 ans

Cauderlier Henri Jules 28 ans fils négociant

Enguerrand René 19 ans employé de commerce au service de M. Cauderlier Henri

Bilard Anne-Marie 16 ans Domestique pour M. Cauderlier Léopold

Boucher Georges Albert 28 ans chef de famille typographe au journal de Bayeux

Cauderlier Jeanne Léopoldine 30 ans femme

Boucher Georges Auguste Léopold 4 ans fils

Commentaire : Jeanne s’est mariée et s’est installée au 19 où a dû naître le petit Georges.

Henri qui a maintenant 28 ans est le nouveau négociant en sel, d’ailleurs l’employé de commerce est au service d’Henri, son père se réservant l’activité de voyageur de commerce.

recensement de 1906

19

Boucher Georges Albert né le 18 janvier 1873 à Bayeux chef de famille typographe au journal de Bayeux

Cauderlier Jeanne Léopoldine née le 22 novembre 1870 à Bayeux femme

Boucher Georges Léopold Auguste Jean né le 1er février 1892 (1897) à Bayeux fils

Boucher Henri Joseph Charles né le 18 juin 1901 à Bayeux fils

Boucher Léon Jean Joseph né le 11 septembre 1904 fils

Lenormand Blanche Marguerite née le 8 mai 1891 à St Pierre du Mont domestique

21 Cauderlier Léopold né le 26 juillet 1847 à Gussignies Nord chef sans profession

Halley Amélie née le 29 juin 1845 à Briquebec femme

Cauderlier Henri né le 13 octobre 1873 à Bayeux fils négociant

Halley Ernest Gabriel né le 8 décembre 1854 à Briquebec beau-frère tailleur d’habits

Taillepied Amédé né le 4 novembre 1886 à Briqueville employé de commerce

Yon Emile né le 11 juillet 1881 à Lissy employé de commerce

Catherine Emile né le 28 février 1886 employé de commerce

Chez les Boucher, deux autres enfants sont nés, donc on a pris une domestique à demeure. Elle a 15 ans.

Léopold s’est retiré des affaires. Son fils Henri, encore célibataire, vit avec ses parents. Ils ont 3 employés, signe que l’affaire est florissante.

Ernest le beau-frère tailleur est revenu après être absent du recensement précédant. Dans quelle pièce vit-il ?

Recensement de 1911

19

Boucher Georges Albert né le 18 janvier 1873 à Bayeux chef de famille

Cauderlier Jeanne Léopoldine née le 22 novembre 1870 à Bayeux femme

Boucher Georges Jean né le 1er février 1897 à Bayeux fils

Boucher Henri Joseph Charles né le 18 juin 1901 à Bayeux fils

Boucher Léon Jean né le 11 septembre 1904 à Bayeux fils

21

Cauderlier Henri né le 13 octobre 1873 à Bayeux chef négociant

Cauderlier Marthe Marie née en 1883 à Pipriac Ile et Villaine femme

Cauderlier Amélie Adélaïde née le 30 juin 1846 à Briquebec mère

Cauderlier André Joseph né le 25 mai 1908 à Bayeux fils

Cauderlier Henriette Marie née le 5 décembre 1909 à Bayeux fille

Gancel Maurice né le 17 janvier 1891 à Carentan

Jeanne Gustave Célestin né à Colleville sur Mer1883 Garçon livreur

Taillepied Léopold Charles né le 8 juillet 1892 Garçon magasin

Lemarchand Delphine Marie née à Saint Côme du Mont le 7 septembre 1889 domestique

Commentaire : les petits Boucher ont grandi, la « fille au pair » est partie.

Henri s’est marié avec Marthe (mamie de Bayeux), ils ont eu 2 enfants, grand-père André et tante Henriette. Léopold est décédé. La grand-mère Amélie vit au RDC dans sa chambre à gauche de l’entrée. On héberge Maurice Gancel le cousin d’Henri. Delphine apparaît. 2 employés sont aussi logés dans la maison.

Recensement de 1921

19

Boucher Georges né le 13 janvier 1873 à Bayeux chef de famille typographe

Boucher Jeanne née le 22 novembre 1870 à Bayeux femme

Boucher Henri né le 18 juin 1901 à Bayeux fils employé de commerce

Boucher Léon né le 11 septembre 1904 à Bayeux fils ajusteur mécanicien

21

Cauderlier Henri né le 13 octobre 1873 à Bayeux chef commerçant

Cauderlier Marthe Marie née le 3 avril 1883 à Pipriac femme

Cauderlier André né le 25 mai 1908 à Bayeux fils

Cauderlier Henriette née le 5 décembre 1909 à Bayeux fille

Cauderlier Denise née le 9 décembre 1912 à Bayeux fille

Cauderlier Amélie née le 30 juin 1845 à Briquebec mère

Hopquin Berthe née le 28 novembre1898 à Hauteville la Guichard employée domestique Cauderlier

Commentaire : qu’est devenu Georges Boucher ? Est-il mort à la guerre de 14-18, ou a-t-il quitté la maison parce qu’il s’est marié ?

Henri Boucher est maintenant en âge de travailler, sans doute pour Henri Cauderlier comme dans le recensement suivant. Ce dernier est-il son parrain ?

Seuls les prénoms usuels sont portés au recensement, ce qui permet justement de savoir à coup sûr quel était le prénom d’usage.

Notre chère Berthe remplace Delphine. Elle sera au service de la famille pour de longues années, jusque dans les années 1960. Eveline et moi l’avons bien connue. Elle avait une jambe de bois et nous épatait quand elle montait et surtout descendait à l’envers l’escalier vers sa chambre sous les toits. Elle nous laissait faire toutes les bêtises, on jouait avec les poids de la balance, on cassait les petites feuilles de mica des poêles.

recensement de 1926

19

Boucher Georges né le 13 janvier 1873 à Bayeux chef de famille typographe au journal de Bayeux

Boucher née Cauderlier Jeanne née le 22 novembre 1870 à Bayeux épouse

Boucher Henri né le 18 juin 1901 à Bayeux fils employé de commerce pour le compte des Cauderlier

21

Cauderlier Henri né le 13 octobre 1873 à Bayeux chef, négociant en épicerie

Cauderlier Marthe Marie née le 3 avril 1883 à Pipriac femme

Cauderlier André né le 25 mai 1908 à Bayeux fils

Cauderlier Henriette née le 5 décembre 1909 à Bayeux fille

Cauderlier Denise née le 9 décembre 1912 à Bayeux fille

Cauderlier Amélie née le 30 juin 1845 à Briquebec mère

Hopquin Berthe née le 28 novembre1898 à Hauteville la Guichard employée domestique Cauderlier

Commentaire : Léon Boucher est parti, sans doute s’est-il marié.

Denise est née.

Recensement de 1931

19

Boucher Georges né le 13 janvier 1873 à Bayeux chef de famille typographe au journal de Bayeux

Boucher née Cauderlier Jeanne née le 22 novembre 1870 à Bayeux épouse sans profession

Boucher Henri né le 15 juin 1901 à Bayeux fils employé de commerce pour les Cauderlier

21

Cauderlier Henri né le 13 octobre 1873 à Bayeux chef commerçant patron

Cauderlier née De la Haye Marthe née le 3 avril 1883 à Pipriac épouse sans profession

Cauderlier Henriette née le 5 décembre 1909 à Bayeux fille sans profession

Cauderlier Denise née le 9 décembre 1912 à Bayeux fille sans profession

Hopquin Berthe née le 28 novembre1898 à Hatteville la Guichard domestique Cauderlier

Commentaire : André Cauderlier a quitté le foyer.

recensement de 1936

19

Boucher Georges Albert né le 13 janvier 1873 à Bayeux chef de famille typographe

21

Cauderlier Henri né le 13 octobre 1873 à Bayeux chef commerçant patron

Cauderlier née De la Haye Marthe née le 9 avril 1883 à Pipriac épouse sans profession

Cauderlier Denise née le 9 décembre 1912 à Bayeux fille sans profession

Hopquin Berthe née le 28 novembre1898 à Hauteville la Guichard domestique Cauderlier

Commentaire : une seule personne au 19, Georges Boucher ! Où sont passés sa femme et son fils ?

Henriette Cauderlier s’est mariée et a quitté le foyer de ses parents. Elle reviendra habiter la maison du 19 bien plus tard.